




Les ETF actifs vont-ils tuer les fonds traditionnels ?

Face à la révolution des ETF et leur ascension fulgurante en Europe, les gestionnaires traditionnels se voient contraints de s’adapter. La montée des fonds cotés à faibles frais bouleverse l’équilibre du marché, poussant les acteurs historiques à se réinventer. Une stratégie s’impose peu à peu : miser sur les ETF actifs, qui allient gestion experte et efficacité structurelle. Ce compromis pourrait être leur planche de salut.
La montée des ETF actifs bouleverse la gestion traditionnelle
Face à la déferlante des ETF à bas coût, qui captent déjà 30 % des encours des fonds d’investissement européens, les gérants traditionnels n’ont plus le luxe de rester à l’écart. Pour ne pas céder davantage de terrain, ils misent désormais sur les ETF actifs, une version pilotée de ces fonds cotés, qui permet d’injecter leur savoir-faire de gestion dans un format plus compétitif. Une évolution stratégique qui vise à répondre à la fois à la pression sur les frais et à la demande d’innovation des investisseurs.
Des pionniers contraints par la pression des marchés
Ce virage stratégique s’illustre par l’arrivée de poids lourds comme Schroders et Jupiter sur le segment des ETF actifs. Ces deux géants britanniques, affaiblis par une baisse continue de leur valorisation boursière, n’ont d’autre choix que de chercher de nouveaux relais de croissance. L’enjeu est clair : lutter contre l’érosion de leurs marges dans un contexte de compétition féroce, notamment face aux mastodontes américains déjà bien installés sur ce terrain.
Les géants dominent déjà le segment des ETF actifs
Le marché européen des ETF actifs reste encore concentré entre les mains de quelques acteurs dominants. JPMorgan occupe une position écrasante avec 55 % des parts et un ETF vedette de 10,6 milliards d’euros sur les actions américaines. Amundi s’illustre aussi, avec la plus forte collecte du trimestre (1,3 milliard d’euros), tandis que Fidelity, Pimco et Vanguard renforcent leur présence. Même BlackRock, pourtant leader mondial de la gestion, n’est arrivé qu’en avril 2024, illustrant l’intensification récente du mouvement.
Un produit hybride aux avantages multiples
Les ETF actifs combinent les atouts des fonds traditionnels et des ETF passifs : une gestion active délivrée dans un format transparent, liquide et à coûts réduits. Facturant en moyenne 30 points de base, ils se positionnent entre les ETF indiciels (10-20 pb) et les fonds classiques (>1 %). Cette structure permet des arbitrages dynamiques en temps réel, tout en répondant aux attentes d’investisseurs en quête de simplicité, de maîtrise des frais et d’accès instantané aux marchés.
Une lente mais réelle adoption par les acteurs européens
Les pionniers européens ne sont pas en reste. Dès 2011, Ossiam (Natixis) lançait son ETF actif fondé sur l’intelligence artificielle ESG. AXA IM a suivi en 2022, avec six ETF actifs représentant désormais 2,4 % de part de marché. D’autres acteurs plus modestes comme Aberdeen, Janus Henderson, Eurizon ou Robeco ont eux aussi franchi le pas. Ces initiatives montrent que l’appétit grandit, même si l’adoption reste progressive et concentrée sur des niches stratégiques.
Le dilemme de la cannibalisation des fonds traditionnels
Pour beaucoup de gérants, les ETF actifs représentent une solution défensive, mais délicate à manier. La crainte majeure : cannibaliser leurs fonds existants, aux frais plus élevés. Ainsi, plutôt que de cloner leurs stratégies phares, beaucoup choisissent des approches plus prudentes, moins engagées, sur des segments très liquides. Arkéa AM, par exemple, veut proposer des ETF actifs pour préserver à la fois ses encours et son savoir-faire, tout en évitant une migration brutale de ses clients institutionnels vers ces nouveaux produits.
Conclusion
Le cadre réglementaire évolue aussi pour encourager ce virage, en limitant l’obligation de transparence quotidienne sur les ETF actifs à une fois par mois, réduisant ainsi le risque de plagiat. Pourtant, le risque d’échec reste réel : depuis 2007, 15,5 % des ETF actifs lancés en Europe ont été liquidés ou fusionnés, avec une durée de vie moyenne de 3,5 ans. Malgré tout, pour les gestionnaires traditionnels, les ETF actifs apparaissent comme une réponse inévitable face à l’essor des fonds cotés. Non pas par choix de cœur, mais par impératif stratégique.
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