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70 heures par semaine en cabinet audit, les salariés craquent

Face à l’épuisement croissant dans leurs rangs et à une direction qu’ils jugent sourde à leurs alertes, les salariés du cabinet d’audit EY ont pris les choses en main. À l’initiative de quatre syndicats (CFDT, CGT, FO et CFTC), un référendum interne a été organisé pour réclamer le retour à une limite hebdomadaire de 48 heures de travail. Le message envoyé à la hiérarchie est clair : les conditions de travail actuelles sont devenues intenables.
Un vote massif qui ne laisse place à aucune ambiguïté.
Ce référendum, tenu du 14 au 21 avril 2025, a mobilisé 40 % des employés d’EY, un taux de participation particulièrement élevé pour ce type de consultation interne. Et le résultat est sans appel : 97 % des votants ont exigé le rétablissement du plafond légal de 48 heures de travail par semaine. Cette mobilisation, relayée par Ouest-France, témoigne d’un ras-le-bol général face à la pression exercée sur les salariés.
Un contexte de travail alarmant depuis 2021.
À l’origine de cette fronde : un accord signé en 2021 avec la CFE-CGC, syndicat alors majoritaire, qui avait supprimé la limite hebdomadaire de 48 heures pour les salariés au forfait jour de la branche audit – soit près de la moitié de l’entreprise. Depuis, les témoignages s’accumulent sur des semaines de 60 à 70 heures, entraînant une hausse préoccupante des arrêts maladie et une véritable « épidémie de burn-out », selon les syndicats.
Une rupture entre les salariés et la direction.
Malgré l’ampleur du vote, la direction d’EY campe sur ses positions. Elle affirme qu’il n’est pas question de remettre en cause l’accord de 2021, estimant que des « mesures d’équilibre » ont déjà été mises en œuvre. Cette posture, perçue comme du mépris par beaucoup de salariés, illustre le fossé qui s’est creusé entre le terrain et les instances dirigeantes de l’entreprise.
Une contestation syndicale rare et déterminée.
Marc Verret, porte-parole de l’intersyndicale, a salué dans Les Échos une mobilisation d’une ampleur inédite dans le secteur du conseil. Pour lui, cette initiative reflète des inquiétudes profondes et un besoin urgent de changement. Bien que le vote n’ait pas de portée juridique, il constitue une démonstration de force qui, selon les syndicats, ne peut être ignorée plus longtemps sous peine de tensions accrues.
Des divisions syndicales persistantes.
La CFE-CGC, absente du référendum, reste en retrait. Sa représentante Laurie-Anne Cadel a exprimé des réserves sur la formulation des questions posées, estimant qu’elles étaient biaisées. Néanmoins, elle reconnaît qu’il est pertinent de consulter les salariés. Cette posture ambivalente contraste avec l’élan unitaire des autres syndicats, et illustre les tensions internes sur la stratégie à adopter face à la direction.
L’intersyndicale appelle à rouvrir le dialogue.
Forte du soutien massif exprimé par les salariés, l’intersyndicale exhorte la direction à revenir à la table des négociations. Elle demande également à la CFE-CGC de se rallier à cette volonté partagée de redéfinir un cadre de travail plus respectueux des limites humaines. Il s’agit, selon elle, d’éviter une fracture sociale durable au sein de l’entreprise.
Conclusion
Même si le référendum n’a pas de valeur légale, son retentissement est politique et humain. EY ne pourra durablement ignorer cette contestation claire et massive. Face aux risques psychosociaux persistants, l’entreprise se trouve désormais au pied du mur : soit elle engage une réforme réelle de ses pratiques, soit elle prend le risque d’une crise interne encore plus profonde.
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