




L'alternance, c'est fini?

Suite à un boom sans précédent des contrats d'alternance, le secteur s'apprête à connaître un déclin abrupt. L'Insee prévoit la disparition de 65 000 postes d'alternants d'ici la fin de l'année, marquant un recul majeur après une période d'expansion exceptionnelle. Cette baisse est la conséquence directe d'une réforme de l'apprentissage visant à réduire les coûts pour l'État.
Une réforme aux conséquences profondes
L'essor de l'alternance, qui a vu le nombre de contrats tripler pour atteindre plus de 870 000 en 2024, était largement alimenté par des aides massives. L'État versait notamment une aide de 6 000 € par contrat, une somme qui a incité un grand nombre d'entreprises, notamment les PME, à recruter des jeunes.
Cependant, la nouvelle réforme, entrée en vigueur en juillet, modifie en profondeur le financement de l'apprentissage. L'aide de 6 000 € a été remplacée par un système différencié : désormais, elle est de 5 000 € pour les PME et de 2 000 € pour les plus grandes entreprises, avec des conditions de quota d'alternants. De plus, une "participation obligatoire" de 750 € est requise pour les entreprises recrutant des alternants de niveau Bac+3 et plus, alourdissant leur charge financière. Le financement des centres de formation d'apprentis (CFA) est lui aussi impacté, passant d'un versement au mois à un calcul au jour près, et 10 % du montant total est désormais différé et versé à la fin du contrat. Cette dernière mesure vise à limiter le gaspillage en cas de rupture anticipée.
L'impact sur les entreprises et les jeunes
Cette nouvelle donne économique n'est pas sans conséquences, en particulier pour les entreprises les plus fragiles et les jeunes candidats. La majorité des apprentis est accueillie dans les petites et moyennes entreprises, qui ont été les premières à profiter des aides massives. Moins robustes financièrement, elles sont aujourd'hui les plus exposées à la baisse des aides et aux nouvelles contraintes. Le risque est de voir ces entreprises réduire significativement leurs recrutements d'alternants.
Cette réforme pourrait créer un apprentissage "à deux vitesses", où les grandes entreprises, plus à même de supporter l'augmentation des coûts, continueraient de recruter, tandis que les PME, essentielles pour l'emploi local, pourraient se désengager. Les secteurs comme le BTP, l'industrie et l'artisanat, qui dépendent fortement de l'alternance, pourraient en souffrir. Pour les jeunes, la réduction des offres de contrats intensifie la concurrence, rendant la recherche d'alternance plus difficile que jamais. De nombreux étudiants pourraient ainsi se retrouver sans solution.
Le tableau plus large de l'emploi
Malgré ces projections sombres pour l'alternance, l'Insee nuance le tableau macroéconomique. Le taux de chômage ne devrait augmenter que légèrement, pour atteindre 7,6 % en fin d'année, et le nombre d'actifs a progressé grâce à la réforme des retraites. Cependant, la disparition des 65 000 postes d'alternants et la stabilisation de l'emploi public laissent présager un ralentissement de la création d'emplois, avec une perte de 51 000 postes dans le secteur privé sur l'ensemble de l'année 2025. Cette situation pourrait peser sur le moral des Français, car les "craintes sur le chômage" ont atteint un niveau élevé, comme le souligne l'Insee.
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