



ÉPARGNE : 20 MILLIARDS DE DÉPÔTS ET UNE CONFIANCE EN CHUTE LIBRE !

En baissant le taux de rendement du livret A à 0,5 % en février dernier, le Gouvernement ne s’attendait sûrement pas à la hausse de sa collecte, et ce, même pas un mois plus tard. Et si jusqu’alors l’Etat pouvait se permettre d’espérer, il n’y a désormais plus aucun doute. Le mois de mars fut littéralement un mois d’épargne en France. Le grand gagnant ? Encore une fois le livret A, qui, sans grande surprise, nous présente des chiffres record.
Le livret A, gage de sécurité face à la crise sanitaire
Dans un tel contexte d’inquiétude mondiale, on ne pouvait pas s’attendre à un autre résultat. Le covid-19 met K.O tout ce qui l’entoure. Et ce, malgré des adversaires plutôt coriaces. C’est ainsi qu’au cours du mois de mars, il a réussi à faire grimper la collecte du livret A à 2,71 milliards d’euros. Valeur refuge par excellence, le livret A a vu son encours augmenter de 50 % en un an. Plus flagrant encore, sa collecte a plus que doublé en un mois : en février 2020, elle était alors de 1,17 milliard d’euros !
Son confrère, le livret de développement durable et solidaire (LDDS), n’échappe pas non plus à ce phénomène. 1,12 milliard d’euros ont été déposés sur ce livret.
À la fin du mois de mars, l’encours de ces deux produits s’élevait à 420,8 milliards d’euros. Ils battent ainsi leur propre record de collecte depuis 2009.
Bruno Le Maire, ministre de l’Économie, est assez inquiet face à ce comportement d’épargne. Il a d’ailleurs déclaré : “ce n’est pas d’épargne dont nous avons besoin aujourd’hui, mais d’investissements”. Selon lui, il y a un fort “risque de voir le taux d’épargne augmenter face aux incertitudes, au détriment du financement de l’économie”.
Toutefois, ce comportement était prévisible. Nous en parlions en effet dans notre dernier article “Epargne et confinement : que pensent les Français”. Le phénomène de “flight to quality” restera sûrement la norme pendant encore quelques mois.
Les comptes courants, qui n’ont aucune limite de dépôts, voient eux aussi le montant de leur encours grandir. Selon la Banque de France, ils totalisent un montant de 13,8 milliards d’euros. L’assurance-vie, elle, subit également la peur des ménages. Les retraits ont en effet dépassé les dépôts de 2,2 milliards d’euros le même mois. En prenant en compte tout cela, la Banque de France estime le montant total des dépôts bancaires à 19,6 milliards d’euros. Si on ajoute à cela le montant des liquidités accumulées, l’épargne financière liquide, le montant de l’épargne grimpe alors à 21,6 milliards d’euros.
Comme Alireza Gorzin, président de BFG Capital, nous l’indique : “Bercy n’a pas su se faire comprendre par les français. La baisse du taux des livrets, dont le A, est faite pour dissuader d’aller vers l’épargne et ce, au profit des investissements. En effet, d’après un sondage réalisé par BFG Capital, les français épargnent entre 10 et 23% de leurs revenus mensuels. Cette épargne, qui travaille à 0,5%, ne saurait aucunement combler la perte financière d’accident de vie, de parcours professionnels ou encore de retraite. Les français ont besoin d’investir et d’aller chercher des effets de leviers intelligents, agiles et sécurisés.”
Pourquoi un tel phénomène d’épargne ? Le confinement, d’abord, qui aura duré 55 jours, et qui a grandement empêché les français de consommer. Mais pas seulement. La peur de l’avenir y est pour beaucoup. Elle se fait d’ailleurs de plus en plus ressentir…
Face à un recul historique de la confiance des ménages
Mardi 28 avril, l’Insee a annoncé un recul historique de la confiance des ménages français. L’indicateur a en effet perdu 8 points, passant ainsi à 95 points, même niveau que celui de février 2019, en pleine crise des Gilets Jaunes. Depuis la création de cet indicateur en 1972, jamais une chute n’avait été aussi brutale. Pour rappel, celui-ci est calculé par la différence entre la proportion de réponses négatives et positives.
La peur et les craintes liées au covid-19 sont plus que présentes au sein des ménages Français. Ils redoutent fortement l’avenir et ont beaucoup de mal à se projeter. D’ailleurs, l’indicateur sur la situation financière personnelle future, est également en très forte baisse.
Le confinement, qui aura duré 55 jours, a renforcé cette peur, et les français craignent maintenant une hausse du chômage, ainsi qu’une hausse des prix de la consommation. De plus, le nombre de demandeurs d’emplois a également subi une hausse historique en mars : +7,1 %.
Malgré les aides proposées par l’Etat, beaucoup restent pessimistes. L’avenir étant très incertain, il est fort probable que la confiance ne revienne pas rapidement dans les prochains mois. La pandémie n’ayant toujours pas de remède, nous sommes face à toute une société qui doit réapprendre à vivre. Les chiffres parlent d’eux-mêmes.
Tant que la peur régnera, il sera difficile de reprendre le cours d’une “vie normale”. L’Etat, qui propose déjà un ensemble d’aide pour les travailleurs, devra redoubler d’efforts pour que les Français reprennent confiance. Sans confiance, pas de consommation, et sans consommation, il sera difficile pour le pays d’effectuer sa reprise économique.
Mais il faut penser à demain. Et à tout ce qui a déjà été accompli. Bien que les Français aient peur, et à raison d’ailleurs, cela ne nous a pas empêché de voir naître de grands élans de solidarité. Beaucoup d’entraide entre voisins, de solidarité envers les personnes les plus démunies, d’aide et de soutien pour le personnel soignant. Beaucoup d’entreprises se sont rapidement adaptées à cette crise sanitaire pour y faire face, et continuer, coûte que coûte, à travailler. L’Etat, bien qu’on puisse lui reprocher un manque de réactivité, s’est également adapté, en protégeant plus de 10 millions de Français à travers le chômage partiel. 10 millions de Français qui peuvent ainsi percevoir une indemnité de salaire, de 84 à 100 % selon leur situation.
Même si la peur est légitime, il est essentiel de garder à l’esprit que demain sera un jour meilleur. Mais que ce jour meilleur ne pourra l’être qu’au travers des efforts de chacun.
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