L'heure de la revanche pour les banques d'investissement européennes ?
Depuis des années, les banques d'investissement européennes, telles que BNP Paribas, Barclays et Deutsche Bank, sont éclipsées par les géants américains sur leur propre terrain de jeu. Cependant, une nouvelle donne réglementaire pourrait inverser cette tendance. Les nouvelles contraintes imposées par les accords de Bâle 3 vont significativement augmenter les actifs pondérés des risques des banques américaines, offrant ainsi une opportunité inédite pour leurs homologues européennes.
Impact des accords de Bâle 3 sur les banques américaines
Les accords de Bâle 3, destinés à renforcer la stabilité financière mondiale, imposeront des contraintes plus strictes sur les banques, en particulier celles des États-Unis. Selon une analyse du secteur financier, les géants de Wall Street seront confrontés à une augmentation de 35 % de leurs actifs pondérés des risques. En comparaison, les banques européennes ne verront ces actifs augmenter que de 15 %. Cette divergence est due à des exigences plus sévères sur les fonds propres et les liquidités pour les banques américaines, qui devront augmenter considérablement leurs réserves de capitaux.
Cette augmentation des actifs pondérés des risques entraînera une réduction du rendement des fonds propres des banques américaines de 2 à 3 points de pourcentage. Pour compenser cette érosion de la rentabilité, ces banques seront contraintes de rationaliser leurs activités, en particulier celles qui sont les moins rentables. Parmi les secteurs susceptibles d'être affectés figurent les dérivés actions, le cash equity, le financement, l'obligataire et les matières premières.
Une manne de 35 milliards de dollars
L'ajustement stratégique des banques américaines pourrait libérer une manne de 35 milliards de dollars, principalement dans les métiers de taux, soit l'équivalent de 15 % des revenus des géants de Wall Street. Cette redistribution des parts de marché représente une opportunité en or pour les banques européennes. Ces dernières pourraient récupérer des parts de marché sur leur propre continent mais aussi aux États-Unis.
BNP Paribas, en particulier, semble bien positionnée pour profiter de cette situation. La banque française a grimpé de la douzième à la deuxième place au classement Refinitiv des banques corporates en Europe en 2023, derrière JP Morgan. Avec des revenus de 1,26 milliard de dollars dans les activités de fusions et acquisitions (M&A), émissions d'actions et de dettes, et crédits syndiqués, BNP Paribas a surpassé des poids lourds comme Goldman Sachs, Bank of America, Morgan Stanley et Citi dans la région.
Les défis à venir
Cependant, tout ne sera pas simple pour les banques européennes. Environ la moitié des 35 milliards de dollars potentiellement délaissés par les banques américaines sera probablement captée par des acteurs non bancaires, tels que les fonds de dette, qui deviennent des concurrents de plus en plus sérieux.
De plus, même si une opportunité se présente, toutes les banques européennes ne sont pas égales face à la prise de risque et à la capacité de la faire accepter par leurs actionnaires. Barclays, par exemple, engagée dans une réduction drastique des coûts et une révision de la structure de sa banque de financement et d'investissement (BFI), aurait des difficultés à convaincre ses investisseurs d'un plan de conquête ambitieux. De même, Société Générale dispose de marges de manœuvre limitées dans ce domaine.
Une opportunité de revanche
Pour les banques d'investissement européennes, cette situation représente une chance de reconquérir des parts de marché perdues au profit des géants américains. En consolidant leurs positions dans les secteurs clés et en exploitant les faiblesses des concurrents américains, elles peuvent espérer rétablir un certain équilibre sur le marché mondial.
En conclusion, les nouvelles contraintes réglementaires imposées par les accords de Bâle 3 pourraient bien marquer le début d'une nouvelle ère pour les banques d'investissement européennes. Si elles réussissent à surmonter les défis internes et externes, elles pourraient non seulement reconquérir des parts de marché en Europe, mais aussi s'imposer davantage sur la scène mondiale. Cette perspective d'une revanche européenne dépendra de la capacité des banques à s'adapter rapidement et efficacement à ce nouvel environnement réglementaire.
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