




Alerte rouge sur les profits de la finance européenne

Alors que les droits de douane faisaient déjà planer un climat d’incertitude sur l’économie mondiale, la nouvelle réforme fiscale américaine, et plus précisément sa « section 899 », pourrait frapper directement le cœur financier de l’Europe. En imposant une retenue allant jusqu’à 20 % sur les revenus de capitaux rapatriés depuis les États-Unis, cette disposition pourrait déclencher une véritable guerre des capitaux, ciblant les banques, assureurs et réassureurs européens implantés outre-Atlantique.
Un risque fiscal inédit pour la finance européenne
La réforme fiscale américaine vise directement les entités de pays accusés de pratiques fiscales « déloyales », comme la France avec sa taxe digitale. Baptisée « revenge tax » par ses détracteurs, cette mesure pourrait marquer un tournant historique dans les relations économiques transatlantiques. Selon George Saravelos (Deutsche Bank), il faut remonter aux réformes de 1984 ou de 1966 pour en trouver d’une telle ampleur.
L’impact potentiel reste flou mais préoccupant
Les entreprises restent prudentes quant aux effets réels de la réforme, car le texte est encore en débat au Sénat américain. Néanmoins, il pourrait devenir un levier dans les négociations commerciales avec l’Union européenne. En attendant, les analystes scrutent ses conséquences possibles sur les dividendes rapatriés et sur les flux financiers.
Des pertes nettes significatives à prévoir
Selon les estimations d’Axiom Alternative Investments, les pertes de bénéfices pourraient aller de -5 % à -10 % pour des sociétés comme Amundi, Commerzbank, Axa ou Crédit Agricole, mais elles dépasseraient les -30 % pour Zurich Insurance et Aegon, très exposés au marché américain. Le graphique montre ainsi un impact de -43 % pour Aegon, -30 % pour Zurich, -20 % pour Swiss Re et une série de baisses significatives pour les grandes banques et assureurs européens.
Les réassureurs en première ligne
Les banques comme Deutsche Bank et Barclays seraient fortement impactées, respectivement à cause de leur activité de banque d’investissement et de crédit à la consommation. Toutefois, ce sont les réassureurs comme Munich Re et Swiss Re qui subiraient les pertes les plus lourdes, en raison de leur forte présence sur le territoire américain.
Une taxation aux effets systémiques potentiels
La réforme ne se limite pas aux bénéfices : elle pourrait aussi toucher les intérêts perçus, même en cas de convention fiscale. Les fiscalistes de Troutman Pepper Locke soulignent que toutes les facilités de crédit – existantes ou nouvelles – pourraient être concernées. Ce mécanisme fiscal pourrait paralyser certains investissements et freiner le refinancement transatlantique.
Une levée de boucliers internationale
Face à cette perspective, les lobbies financiers sont montés au créneau. L’Institute of International Bankers a averti que cette taxation risquait d’entraver l’investissement direct étranger et de nuire aux marchés financiers américains eux-mêmes. De leur côté, les gestionnaires d’actifs craignent une hémorragie de capitaux due à la fiscalisation des revenus passifs, et appellent à des amendements urgents.
Conclusion
Même si les bons du Trésor américains semblent épargnés dans la version actuelle du texte, leur stabilité pourrait être remise en question. Selon Andrew Lautz, la chute des investissements directs étrangers pourrait indirectement affaiblir la demande pour ces titres, déjà fragilisés depuis le « Liberation Day ». En ciblant les flux de capitaux et non plus uniquement les biens physiques, la réforme Trump ouvre un nouveau front dans la guerre économique mondiale. Pour la finance européenne, le choc pourrait être brutal si le texte était voté en l’état. Plus qu'une simple « revenge tax », c'est une nouvelle ère de rivalité fiscale et réglementaire qui s’annonce.
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