




Visa & Mastercard, tiennent l’Europe par le portefeuille

Dans un contexte de rivalités économiques mondiales, la souveraineté numérique et financière de l’Europe devient un enjeu stratégique majeur. La domination des géants américains du paiement, comme Visa et MasterCard, soulève des inquiétudes croissantes quant à la dépendance du Vieux Continent. Lors du France Payments Forum, experts et acteurs du secteur ont mis en lumière les risques que fait peser cette hégémonie sur la stabilité économique et la capacité de l’Europe à préserver son autonomie.
Une domination américaine qui inquiète
En pleine guerre commerciale, la dépendance de l’Europe aux géants américains du paiement suscite une alerte stratégique. Lors du France Payments Forum, les professionnels du secteur ont tiré la sonnette d’alarme : seule une poignée de pays européens disposent encore d’un système de paiement national. En 2022, Visa et MasterCard concentraient à eux seuls 61 % des transactions par carte dans la zone euro. Une situation que certains jugent dangereuse pour la stabilité économique, surtout à la lumière des tensions diplomatiques passées avec l’administration Trump.
L’indépendance passe par une stratégie industrielle claire
Le Trésor français insiste : sans stratégie industrielle forte, pas d’autonomie stratégique. Les cartes de paiement et les services numériques essentiels sont perçus comme des leviers d’influence américains. Et même si une coupure volontaire des services semble peu probable aujourd’hui, la domination technologique étrangère reste une menace potentielle à long terme.
Transparence et régulation au cœur des priorités
Paris plaide pour une supervision accrue des acteurs du paiement, notamment sur leurs frais, ainsi qu’une régulation plus ferme des portefeuilles numériques comme Apple Pay. Cette ligne dure, autrefois isolée, trouve désormais un écho croissant à Bruxelles, signe que l’Europe commence à se mobiliser plus sérieusement sur le sujet.
La France en position de leader
La France fait figure de modèle avec son système Cartes Bancaires (CB), son infrastructure STET et son implication dans le portefeuille européen Wero. Grâce au soutien de la Banque de France, les banques françaises sont incitées à mettre en avant le logo CB, symbole de souveraineté. À l’échelle européenne, la situation est plus contrastée, certains pays comme l’Irlande ou les pays baltes étant encore très dépendants des réseaux étrangers.
Des initiatives à saluer, mais attention à la fragmentation
La Commission européenne soutient les efforts privés comme Wero ou EuropA (Bizum + partenaires portugais et italiens), mais prévient : ces initiatives ne doivent pas creuser davantage les divisions du marché européen. Alexandra Jour-Schroeder appelle à plus de coordination pour éviter une mosaïque inefficace de solutions nationales.
L’euro numérique comme outil stratégique majeur
L’euro numérique est vu comme une pièce maîtresse de cette souveraineté retrouvée. Malgré les réticences en France, la BCE presse le Parlement européen d’accélérer son adoption. Face à la montée en puissance des stablecoins adossés au dollar, ce projet est aussi une réponse à la volonté américaine d’imposer ses normes jusque dans les monnaies numériques.
Conclusion
Face à une domination technologique étrangère persistante, l’Europe semble enfin amorcer un sursaut stratégique. Entre régulation renforcée, soutien aux initiatives locales et promotion de solutions comme l’euro numérique, les leviers d’action existent pour retrouver une forme de souveraineté. Mais cette reconquête ne pourra se faire sans une vision industrielle unifiée, une coordination européenne renforcée et une volonté politique assumée. La bataille pour l’indépendance des paiements est lancée, et elle sera décisive pour l’avenir économique du continent.
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